
Article de Thierry Brun paru dans Politis le 10 décembre 2004.
LES DIRIGEANTS D’ATTAC NE S’ATTENDAIENT PAS à un tel succès. « C’est la glorieuse incertitude des urnes », ironisait Bernard Cassen, le très actif président d’honneur, lors de l’assemblée générale de l’association, les 11 et 12 décembre. Le samedi après-midi, l’atelier sur le traité constitutionnel européen, qui devait s’organiser autour des résultats de la consultation des adhérents, a dû se contenter d’estimations pour débattre de propositions d’actions pour le « non » au traité. Les résultats définitifs ne sont arrivés que le lendemain dans la matinée, en raison de la participation « exceptionnellement élevée » des adhérents, « eu égard aux nonnes associatives traditionnelles », a souligné le conseil d’administration d’Attac. 13 000″bulletins de vote (44 % des 29 500 adhérents) sont parvenus à l’AG, soit le double de ce qui était attendu.
Les militants altermondialistes devaient répondre à deux questions. À la première — « Êtes-vous pour ou contre la ratification du traité constitutionnel européen ?» —84 % des votants ont répondu « contre ». 10,8 % sont pour et 5,2 % se sont abstenus. La réponse à la deuxième question, « Souhaitez-vous qu’Attac donne des indications de vote ? », était très attendue. Les militants se sont prononcés à 72 % en faveur de l’engagement d’Attac dans la campagne pour le « non-»–(1-9,6 % sont contre cet engagement). Parallèlement à la consultation, le président d’Attac, Jacques Nikonoff, a rappelé que les adhérents ont adopté «à 85 % »une résolution proposée par le CA «rappelant qu’Attac n’a pas vocation à devenir un parti politique ni à s’engager lors des élections ».
Attac interviendra cependant dans le débat politique et s’engagera « dans la campagne pour un « non » authentiquement européen » au traité constitutionnel. Quelles formes prendront les «indications» de vote ? L’association contactera prochainement « les associations, les syndicats et les partis politiques démocratiques résolus, eux aussi, à contribuer à la victoire du « non »», et lancera dans quelques jours « une grande souscription avec un objectif de 200 000 euros ». Dans le cadre de cette campagne, Attac participera le 19 mars à Bruxelles à la manifestation européenne contre l’Europe néolibérale. Et l’association organisera son propre événement, le 30 avril à Paris, sur le thème : « L’Europe que veulent les Européens ; l’Europe que le reste du monde attend. » Des intervenants de divers pays participeront à ce grand rassemblement.
L’avenir d’Attac était aussi une des grandes questions de l’AG. Les propos, souvent tendus sur l’actuelle présidence, ont porté sur le renouvellement de celle-ci en 2005. Des élus du CA et des membres fondateurs, signataires d’une contribution au débat sur « une nouvelle dynamique pour Attac », publiée en septembre 2004, ont exprimé le souhait d’un changement du fonctionnement de l’association, indiquant que « le style de direction doit être radicalement transformé ». Présente lors de l’AG, Annick Coupé, de l’Union syndicale Solidaires, ne cachait pas que « ce changement n’a pas eu lieu » et pointait les «stigmatisations, notamment de syndicats », ainsi que « la tentation de l’autoritarisme » de l’actuelle présidence. Dans les coulisses, certains membres du CA annonçaient qu’il y aurait plusieurs candidats. L’année 2005 sera bien une année de campagnes pour l’association altermondialiste.
THIERRY BRUN